Caste in

Nous sommes le jeudi 11 juin, il est 16h25. J’attends depuis quelques minutes devant un commerce. Ils ont mis en place un dispositif, on se croirait chez Disney. Et ce sont les vendeurs qui viennent chercher les clients à la porte pour éviter l’affluence dans la boutique. Ça m’énerve car, à mon avis, ils n’auront pas ce que je cherche. En effet, je n’en suis pas à mon premier coup d’essai. On peut même dire que c’est ma dernière chance. J’ai essuyé neuf échecs consécutifs. Il faut dire que je cherche la perle rare.

AHHH, enfin, on vient me chercher. Plutôt que de rentrer pour rien, je demande directement sur le pas de la porte : « Est ce que vous vendez des haricots tarbais ? »
– Non, malheureusement…
« Bon tant pis »
– … uniquement secs.
« Ah mais c’est parfait ! De toute façon ce n’est pas la saison.
– Je croyais que vous les cherchiez frais.
(Il se peut que j’ai levé les yeux au ciel à ce moment.)

Virginie me précède et se dirige jusqu’au fond du magasin. Elle prend un immense bocal dans lequel se trouve les précieux haricots. Elle se retourne et avec tous le mépris possible, mais tout en restant très polie, elle me dit :
– Par contre c’est 19.99 € le kilo.
Sous entend, vu comment t’es fagoté, je doute que tu puisses te permettre.

Sauf que Virginie est un peu conne, si je cherche un produit si spécifique, c’est que je me suis renseigné et que par conséquence, je connais la valeur du produit.

« Je vais en prendre un kilo. »

Il est vrai que je dénote. Je suis habillé comme un pouilleux, mouillé parce qu’il pleut et que j’ai pas eu envie de m’encombrer avec un parapluie, et je dois avoir une sale gueule parce que ça fait plus d’une heure que je cherche ces putains d’haricots. En plus ça sent le fric à fond dans la boutique : les petites vieilles sont toutes bien apprêtées. Je vois même un carré Hermès soigneusement noué autour du cou délicat de Bérengère. Et il doit pas leur arriver souvent qu’un client paye avec une carte Electron. Bref. J’ai mes haricots.

J’aime le mépris de classe.