Comment un ananas est devenu une légende, un mythe

Nous sommes le vendredi 20 mars, il est 16h12. Vous le savez, j’aime que les choses soient organisées. Heureusement le programme est assez clair. M. et J. arrivent en voiture de Lille. On transfert leurs affaires et on décolle aussitôt pour Bordeaux. Heureusement Apple a introduit avec iOS 7 la possibilité de suivre la localisation d’un contact directement depuis l’application message. Ils approchent de la barrière de péage de Senlis. Je décide donc de commencer le chargement de la voiture.

Je commence par ce que j’emmène. J’ai pas grand chose : un petit sac et mon duvet. H., elle en revanche, se pointe avec tout un barda : une valise, deux duvets, deux oreillers et plein de sacs. L. a préféré prendre l’avion. Lille Bordeaux en moins d’une heure, on peut le comprendre. Mais il a confié ses affaires à H. Ce qui explique les oreillers et duvets en double mais quand même. Une fois la valise et l’équipement de nuit on utilise déjà plus de la moitié du coffre.

Si on veut tout faire tenir il faut optimiser la chose. Je jette un coup d’oeil aux sacs qu’elle souhaite emporter. Dans le premier je trouve une bouteille de rhum d’1,5 L. Sauf qu’il ne reste qu’un fond dans la bouteille. « – On va pas faire 600 bornes avec 3cl contenu dans 1,5L c’est mort. »

Je farfouille à nouveau et là je tombe sur un paquet de chips format familial. Je sais bien que tout le monde ne peut pas avoir le même fonctionnement que moi. Que des intelligences autres existent. Mais là quand même. A quel moment on peut se dire que c’est la chose à faire. « – Sais tu qu’à Bordeaux il existe aussi des magasins et qu’on va pourvoir acheter tout ce qu’on veut sur place. Ils font même des chips à Bordeaux. En plus on va les écraser dans le coffre. C’est non. »

Je continue mon inspection. Et là je tombe sur le clou du spectacle : un ananas. Pas en forme, il a déjà pas mal d’heures au compteur. « – Non mais WTF on va pas se trimballer avec un ananas jusqu’à Bordeaux »La responsable de cette ineptie me rétorque « On va le manger, parce que sinon il sera plus bon quand on reviendra. » « – Mais fallait le manger avant de venir. Il aurait jamais dû quitter Lille en fait. On a autre chose à faire que de bouffer un ananas. Et surtout que ça prend de la place. » 

A ce moment les pd arrivent. Embrassades, petites blagues… On est pas là pour rigoler. Hop hop hop. On transfère leurs affaires dans mon coffre. H. en profite pour essayer de caser son putain d’ananas de merde. Je m’énerve. Le coffre est plein à craquer alors que j’ai quand même un Peugeot 2008. On est pas sur un coffre de Fiat Panda. On est quatre avec des affaires pour cinq et ça déborde déjà. J’explique aux autres pourquoi je m’énerve comme ça. « – Vous vous rendez compte que ce putain d’ananas il a fait Costa Rica – France, puis Lille, puis Paris. Et maintenant on l’emmène à Bordeaux ? C’est n’importe quoi. Pour ne pas perdre trop de temps, ou parce que je suis quelqu’un d’agréable à vivre, je finis par céder. On monte tous à bord, c’est parti pour 6 heures de route si tout se passe bien. 

Heureusement le trajet se déroule presque sans encombres. Nous arrivons chez la bordelaise vers 1h du matin. Tout le monde s’installe vite fait et dodo. Au réveil nous nous préparons et nous partons visiter la ville. C’est super agréable. On mange au resto et nous ne rentrons à la coloc qu’en fin d’après midi. Le soir y a une petite fête de prévue. J’embarque Jb pour aller faire quelques courses. Comme je m’y attendais, les supermarchés c’est un truc de commun à Bordeaux. On trouve des chips, du rhum et tout ce qu’on veut. INCROYABLE. Comme quoi on avait pas besoin de ramener quoique ce soit. On passe une super soirée. 

Le lendemain le réveil est difficile. Malheureusement nous ne pouvons pas trop trainer, il faut rentrer. J’ouvre le coffre et commence le chargement. Et qu’est ce que je vois ? L’ananas! Ah bah ça alors! Ils ont eu le droit à une scène. « Je l’avais bien dit » « C’était couru d’avance »… En arrivant à Paris je me suis empressé de changer l’ananas de coffre pour qu’il puisse repartir à Lille. 

On pourrait se dire que cette histoire est terminée. Mais en fait elle a eu des conséquences.

Nous sommes quelques semaines après cet incident. Nous sommes sur le point de partir pour une session urbex. Juste avant le départ, on glisse une béquille dans le coffre de ma voiture. Je proteste. On m’explique que c’est un exercice, que je dois lâcher prise. Que c’est le nouvel ananas. J’ai beau protester je n’obtiens pas gain de cause. On s’est donc trimballé toute la journée avec une béquille parfaitement inutile. La fois d’après ce fut une miche de pain rassis d’1kg. 

Là où ça a dégénéré c’est quand la bordelaise m’a offert un porte-monnaie en forme d’ananas pour que « tu sois jamais sans un ananas ». Cette connerie a atteint son apogée le 17 octobre. Pour mettre fin à ce délire j’ai moi même ajouté un « ananas » à mes affaires de randonnée. Randonnée?!? Oui un week-end, M., L., T. Et moi avant décidé de faire une randonnée dans les Pyrénées. Objectif : le lac de Gentau à 1947m d’altitude. Plus de 2h de montée avec un dénivelé de plus 500m. Une nuit en refuge, et descente le lendemain. Hé bien oui, je me suis trimballé un « ananas » tout le long. Et ce jour là c’était un potimarron qui a servi à l’exercice.