Nous sommes le dimanche 10 avril il est 9h05. Je quitte mon domicile. En tout cas j’essaye. La porte de mon immeuble qui me donne du fil à retorde depuis quelques jours est encore bloquée. Hier j’ai failli l’arracher tellement ça m’a énervé. Mais là je prends une grande respiration et tente de mener une action plus réfléchie. Et ça fonctionne.

Dehors le ciel est immaculé, la rue est inondée de lumière c’est vraiment superbe. Je passe la passerelle au dessus du bras mort de la Deule. Les péniches alignées étincellent au soleil. À 9h08 je pénètre dans mon bureau de vote. Je récupère quelques bulletins et me glisse dans l’isoloir. Quelques secondes plus tard je rejoins la file d’attente. Y a un chat tout miteux qui est rentré dans l’école et qui se ballade entre les jambes des citoyens. Y a que cinq personnes devant moi mais c’est bien long je trouve. Ah merde Ludivine caresse le chat. Mais elle est conne ou quoi ? Quand tu vois sa gueule tu comprends toute de suite qu’il a la gale, des puces, le rhume des foins et le COVID. Et elle se désinfecte pas les mains après. Voilà comment on propage des maladies. Je finis par arriver devant l’urne. Parce que oui le bureau est étrangement installé. Les gens munis de leurs enveloppes se retrouvent face à l’urne. L’assesseur qui doit vous faire signer la liste avant de vous laisser voter à droite. Le tampon lui est apposé par la personne qui surveille l’urne. Alors qu’un troisième à gauche ne fait rien. Je ne sais comment ils ont pu se dire utilisons une configuration en T. Pas étonnant que ça traîne. Je laisse ma carte d’électeur en signe d’engagement. Car comme à chaque élection je me propose pour le dépouillement. Je sors du bureau avec le sentiment du devoir accompli.

Au lieu de retourner directement chez moi, je prends la direction du métro. A cette heure, la rame est quasiment vide, c’est fort agréable. Je descends à la station Lille Flandres et redescends la rue Faidherbe. Lille est vraiment magnifique. La ville est encore calme. Je me prends un café et une viennoiserie au passage. J’ai rendez-vous juste à côté de l’opéra mais je suis en avance. J’en profite donc pour m’installer au soleil place Léon Trulin.

Quelques minutes plus tard l’impératrice du monde à l’envers arrive. C’est avec elle que j’ai une mission à accomplir. Nous rejoignons son véhicule, une antique Twingo d’un bleu douteux. Nous montons à bord et nous prenons la direction de porte de Douai. Notre mission : aller à la déchèterie. Vous savez à quel point j’aime aller dans ce genre d’endroit. Étrangement y a toujours des beaux gosses. Le trajet se passe sans encombre. Je dois répéter plusieurs fois les indications de l’itinéraire mais dans l’ensemble ça va.

Arrivés à destination je suis un peu déçu. L’endroit est quasiment désert. Pas l’ombre d’un beau mâle. Nous vidons le coffre du véhicule dans les différentes bennes. Et c’est déjà le temps de rentrer. Le trajet est encore plus facile à faire dans ce sens ça devrait aller. Cependant arrivés au niveau de porte de Valenciennes, après avoir suivi la ligne de métro, N. décide de tourner à droite.

Je suis surpris. – C’est pas du tout le bon chemin, tu vas en direction d’Hellemmes là. « Mais non c’est bon. » – Pas du tout, on part à l’opposé. Pire, au feu, elle prend l’autoroute direction Paris-Bruxelles. – Mais qu’est ce que tu fais ? « C’est bon. » – Mais non. On va à Paris là. La prochaine sortie c’est Ronchin et on est censé aller à l’opposé. « Mais si je te dis que c’est bon. » – T’es cinglée. C’est un enlèvement ? La seule chose à faire c’est de m’écouter. J’ai toujours raison. Et bien N. s’entête et dépasse la sortie Ronchin. – Euh moi j’ai un barbecue ce midi j’ai pas 10 000 ans devant moi. On part à l’opposé. Et là j’ai une fulgurance. – Ouais c’est la bonne route pour aller chez ta mère, pas chez toi. J’ai vu juste. Son visage s’illumine elle a compris. Nous prenons donc la sortie d’après qui s’avère être celle de Lesquin. On a fait un sacré détour.

Le reste de la journée est beaucoup plus calme. À 18h45 je pars de la maison pour me rendre au bureau de vote pour le dépouillement. Une fois sur place, je découvre une immense file de plusieurs dizaines de mètres. WTF. Je m’approche de l’entrée du bureau. Au départ je pense que la faute incombe (mot compte double) aux électeurs qui se sont pointés au dernier moment. Mais très vite j’apprends que les gens qui sortent ont fait plus d’une heure de queue. Et c’est comme ça depuis midi au moins. À 19h il y a un peu d’agitation, j’entends parler de grille. Je n’en vois pas et il en faudrait des dizaines pour faire un périmètre permettant de contenir tout le monde. Les minutes s’écoulent, interminables.

Il est 19h46 quand j’aperçois enfin cette fameuse grille. Elle est placée après les derniers citoyens arrivés avant 19h. Un assesseur (avec une tête de premier de la classe) est chargé de suivre la progression de la file en déplaçant au fur et à mesure la grille. Comme il reste une dizaine de personnes dehors je décide de rentrer dans l’école. Je rejoins les futurs dépouilleurs dans la cour de récréation. Il est 20h06 quand le dernier électeur sort du bureau. Je sens déjà que ça va pas être simple.

À l’appel d’une assesseur, nous rentrons dans le bureau. Elle récupère les cartes d’électeur laissées et fait l’appel. En cours de route elle décide de former les tables avec deux depouilleurs ayant de l’expérience et deux novices. Une fois les équipes formées, l’assesseur retourne auprès de ses collègues nous laissant en plan. Pour faciliter la compréhension je vais toute suite vous dresser le portrait de l’équipe. Nous avons Véronique la cinquantaine, fumeuse depuis plus de 40 ans, un peu cas soc sur les bords, elle a dû voter FN. Ensuite on a Fatima la quarantaine, sympathique mais qui donne l’impression de se laisser déborder par ses collègues. Puis vient Éric la cinquantaine il se la raconte un peu alors qu’on voit qu’il est parfaitement incompétent. Et pour finir Émilie la trentaine dynamique mais comme tous les autres novice dans la tenue d’un bureau de vote. Elle semble complètement larguée.

Comme personne se décide et que j’ai pas envie de coucher là, je prends les choses en mains. Je commence par démonter un isoloir. Je suis rapidement suivi par le reste des dépouilleurs. On installe les tables disponibles, les chaises. Y a que deux tables non occupées, il nous en faut quatre. Je déplace tout le bordel laissé sur l’une d’elle. Ils sont surpris dans la team des assesseurs. En dix minutes à peine on a installé le matos. Je n’hésite pas un seul instant, je vais me servir et dépose les stylos sur les tables. Pour finir je m’assoie en face du beau gosse qui fait partie de ma table. Je peux pas en faire plus. Il faut attendre que l’équipe B compte les bulletins et les dispatche par centaine dans de grandes enveloppes. Et légalement on a pas le droit de le faire. C’est pas l’envie qui nous manque….

Finalement nous obtenons notre première enveloppe de centaine. Nous la vidons et commençons à constituer les tas pour contrôler le nombre de suffrages. Cette vérification faite, nous commençons le dépouillement. Y a Rémi qui a déjà de l’expérience qui ouvre les enveloppes, Claire qui annonce le nom du candidat, Florent le beau gosse qui bâtonne avec moi. Mais j’ai dû mal à suivre, y a une conne qui parle fort à la table d’à côté. Bon an, mal an, nous arrivons au bout.

Nous sommes la table qui obtient la dernière centaine. Nous avons gagné en rapidité. À 21h54 je me lève, embarque les bulletins, les feuilles d’émargement pour les remettre aux assesseurs. Problème, ils ont tous les yeux rivés sur leurs téléphones. Vu le merdier, les résultats sont connus depuis un bout de temps. J’attends donc comme un con avec les résultats. Et j’attends longtemps. J’ai envie de gueuler un bon coup mais Florent me lance des regards et se marre. Au bout de 5 minutes, Fatima lève les yeux et me remarque. Elle récupère ce qui doit être conservé.

Il faut désormais qu’ils affichent les résultats et ça encore une fois c’est pas gagné. Y a déjà eu quelques reports de résultats. Il y a déjà pas mal de ratures. Ça fait super classe un tableau dégueulasse. Une fois les résultats des différentes centaines ajoutés, ils commencent le calcul des totaux. Nous les aidons parce qu’ils sont vraiment trop nuls. Nous trouvons une erreur et il a fallut plus de 10 minutes pour en trouver l’origine : un mauvais report. Nous terminons ce dépouillement à 22h12. Du jamais vu.

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5 commentaires

Jean Marie · avril 25, 2022 à 16:27

De mon temps ça allait plus vite les dépouillements et c’était fait entre français.

Eric Z. · avril 25, 2022 à 16:36

Encore une preuve du grand remplacement ! C’est fait exprès pour saper notre démocratie !

Relecteur officiel · avril 25, 2022 à 17:53

Mars ou avril ? Date à éclaircir merci

La p’tite méluchette · avril 25, 2022 à 18:00

Je ne peux m’empêcher de me demander si cette élection a été correctement comptabilisée. Est ce qu’on vérifie à l’entrée que les depouilleurs savent lire écrire et compter ?

Colomb C. · avril 27, 2022 à 09:26

AAAAh votre épopée me rappelle ma jeunesse quand je suis parti pour l’archipel des Bahamas !

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